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Le bilan radiatif de la Terre passe par la forêt

Comment les arbres contribuent à la régulation du climat

Le bilan radiatif de la Terre et les forêts
La Terre dans l'espace, crédit NASA

Le bilan radiatif de la Terre consiste à faire l’inventaire du flux d’énergie qui arrive de l’espace vers notre planète et de la façon dont il est renvoyé vers l’espace.

 

Globalement ce bilan radiatif est à l’équilibre, sans quoi la vie sur notre planète ne pourrait pas se développer.  Son équilibre se déplace cependant, sous la variation de la quantité des gaz à effet de serre émis par les activités humaines, mais aussi d’autres facteurs que nous allons voir ici.

 

Ce qui est intéressant de comprendre, c’est que le cheminement du bilan radiatif de la Terre passe par les forêts.

 

Quand on évoque le lien entre les forêts et le climat, on pense en général à la capacité des arbres à stocker le CO2, un des principaux gaz à effet de serre responsable du réchauffement climatique. Ce phénomène lié à la photosynthèse est bien réel, important dans la régulation climatique, mais ce n’est pas le seul, et peut être pas le plus essentiel.

 

L’évapotranspiration, ou la capacité des arbres à générer de la vapeur d’eau lors de la photosynthèse, intervient de façon déterminante dans la régulation du climat. Cette évapotranspiration se trouve dans le chemin du bilan radiatif de la Terre.


Le schéma du bilan radiatif de la Terre

Le schéma du bilan radiatif de la Terre
Schéma du bilan radiatif de la Terre, crédit ENS Lyon

La Terre reçoit une énergie du soleil par rayonnement à hauteur de 340W par m2 de surface terrestre. C’est l’énergie reçue en haut de l’atmosphère. 51% de cette énergie arrive au niveau du sol. Le solde est absorbé par l’atmosphère, réfléchi par l’air ou les nuages ou directement par le sol. 30% de l’énergie reçue repart directement dans l’espace sous forme de rayonnement.

 

Pour assurer l’équilibre thermique de la planète l’énergie qui parvient au niveau du sol doit être réévacuée vers l’espace. Ce retour passe par trois chemins :

  • La convection par l’air qui se réchauffe au contact du sol et repart dans l’atmosphère ;
  • Le rayonnement infra-rouge (21% de l’énergie arrivant en haut de l’atmosphère) qui repart en partie vers l’espace, en partie absorbé par les gaz à effet de serre contenus dans l’atmosphère. C’est le dérèglement de cette partie absorbée par l’augmentation de la teneur en CO2 qui provoque le changement climatique.
  • La dernière partie évaluée du sol l’est par l’eau ou plus précisément par l’évaporation de l’eau à la surface. Cette évaporation absorbe de la chaleur, appelé chaleur latente. Cette évaporation provient à 85% des océans, le reste des continents. Les sols des continents contiennent moins d’eau que les océans, l’évaporation est donc moins intense, et la quantité d’énergie qui peut être évacuée par ce chemin est moindre. Ceci explique en partie un réchauffement plus fort sur les continents qu’au-dessus les océans. La quantité d’énergie évacuée du sol par la chaleur latente représente 23% de l’énergie reçue par la planète.

La seule possibilité pour la terre de conserver un équilibre thermique est de renvoyer l’énergie reçue vers l’espace. Le seul vecteur possible est le rayonnement. C’est aux hautes altitudes, vers 5000 à 6000 mètres que les gaz de l’atmosphère renvoient l’énergie vers l’espace sous forme de rayonnement.

Le rôle des forêts dans le bilan radiatif

Comment les forêts contribuent elles au bilan radiatif de la planète

Les bénéfices apportés par les arbres et forêts sont nombreux : fabrication de l’oxygène, des sols, stabilisation des terrains, maison de la biodiversité, absorption et stockage du CO2, fourniture de bois…

 

En plus de toutes ces fonctions les forêts jouent un rôle essentiel dans le cycle de l’eau qui comprend deux temps :

Les forêts alimentent ainsi le flux de chaleur latente qui évacue l’énergie du sol vers les hautes couches de l’atmosphère. C’est ainsi qu’elles contribuent au bilan radiatif de la Terre. La capacité des forêts à ainsi réguler le climat est essentielle, notamment pour atténuer les effets du réchauffement climatique.

 

On comprend ainsi que toute action de déforestation aura des conséquences néfastes pour la régulation du climat. C’est ce que montrent les études qui suivent les conséquences des déforestations, notamment en Amérique du Sud.

 

A contrario, toute opération de reforestation significative apportera des bénéfices significatifs en termes de modération des températures et de maintien des régimes de précipitations. 


Changement climatique : le cas de la France

Le réchauffement climatique est en marche à vive allure. En 2023 il atteindra probablement

1,5° sur la planète par rapport aux températures moyennes du la première partie du 20ème siècle. Il faut aussi comprendre que les continents se réchauffent deux fois plus vite que les océans, car la contribution des sols au bilan radiatif de la Terre est différente : les sols des continents contiennent moins d’eau que les océans, et donc l’évaporation y est moindre. Sur les terres qui accueillent peu de forêts l’évacuation de l’énergie par chaleur latente et très limitée accentuant ainsi le réchauffement.

 

Sur les continents le réchauffement climatique a atteint deux degrés. En France nous avons dépassé cette valeur et les régimes de précipitations changent à vive allure : moins de pluie en été, canicules et sécheresses plus fréquentes, fortes et longues, et un peu plus de précipitations pendant la saison automne hiver.

 

Le changement climatique en France
La répartition des forêts en France

En France le changement climatique est particulièrement violent, plus qu’ailleurs en Europe, sauf peut-être en Espagne. Les extrapolations des évolutions de températures / précipitations sont très préoccupantes. La cause de cette extrême sensibilité au changement climatique tient beaucoup au manque de végétation permanente sur les grandes plaines agricoles. Ce sont les espaces les moins arrosés de France. L’infiltration des eaux dans les sols est freinée et l’évapotranspiration limitée. Le flux d’évacuation d’énergie pour le bilan thermique de la Terre est altéré. Le manque de forêts sur la partie ouest du territoire, du Laurageais à la Flandre en passant par la Saintonge, la Beauce, le plateau des Hauts de France pénalise le bilan radiatif lié à l'évacuation de la chaleur latente.

 

L’aménagement du territoire a altéré la pompe biotique qui renforce les niveaux de précipitations sur les continents. 

Tableau d'infiltration de l'eau dans les sols
Taux d'infiltration des eaux dans les sols, par Aurélien Bansept

Reboiser pour réguler le climat

On comprend que le taux de boisement d'un territoire a un effet déterminant sur le taux d'infiltration des eaux de pluie dans les sols et par la suite sur le taux d'évapotranspiration.

 

C’est l'objet du projet de la Terre du Futur pour atténuer les effets du changement climatique en France et protéger les espaces agricoles de la sécheresse. Il vise à planter des espaces forestiers sur la partie ouest du territoire afin de réamorcer la pompe biotique.

 

Et au delà de la régulation du climat il a bien sur beaucoup de raisons pour lesquelles les forêts jouent un rôle important:

  • le développement et la protection de la biodiversité;
  • la construction et le maintien des sols;
  • la production d'oxygène;
  • la fourniture de matériau bois, d'ingédients pour la pharmacopée;
  • leur beauté tout simplement...  

Cet article a été rédigé par Frédéric Durdux