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Le climat en Picardie, vers la désertification?

L'alerte du Courrier Picard sur la disponibilité en eau

Le climat en Picardie, Hauts de France. Le bassin Artois Picardie vu par le Courrier Picard.
Paysage de Picardie, dans l'Aisne, peu de forêts.

Dans son édition du 17 novembre 2022, le Courrier Picard consacrait un cahier spécial sur le climat en Picardie. Il y était plus particulièrement question de la crise de l’eau dans cette région, suivant l’épisode de sécheresse marqué de l’été 2022.

 

Le cahier titrait « Eau, fini l’insouciance ».

 

Le contenu des feuilles que le Courier Picard consacrait à cette thématique traduit une prise de conscience croissante. Celle de la conséquence du changement climatique sur la disponibilité de la ressource eau, et d'une manière plus générale, du cycle de l'eau


La synthèse de l'Agence de l'eau du bassin Artois Picardie

Le cahier du Courrier Picard sur le climat en Picardie et la sécheresse de 2022.
Cahier du 17 novembre 2022

Dans ce cahier du Courier Picard consacré au climat en Picardie et synthétisé par Anne Sophie HACHE, la parole est largement donnée au directeur de l’Agence de l’Eau du bassin Artois Picardie, Thierry Vatin.

 

Thierry Vatin résume situation de la disponibilité de la ressource eau dans la région Artois Picardie de la façon suivante :

  1. La région est caractérisée par un bassin plat, au sein duquel 95% de la ressource en eau est souterraine. Les quelques rivières qui s’écoulent comme la Somme, l’Authie, l’Escaut représentent peu de la ressource disponible en eau. Beaucoup de cours d’eau ont été canalisés, il y a peu d’écoulement de surface.
  2. Les pressions liées aux pollutions urbaines, industrielles et agricoles sont très fortes.
  3. L’image du climat de Picardie frais et pluvieux est trompeuse. Depuis 2017, le territoire subit des épisodes de sécheresses récurrents. L’extrapolation des scénarios du GIEC indiquent que cette situation est amenée à perdurer et s’amplifier.
  4. Dans ce contexte de changement climatique, les nappes souterraines ne se rechargent plus et celles-ci se vident progressivement. Les prélèvements sont de plus en plus importants.
  5. Les conséquences du réchauffement climatique arrivent bien plus tôt que prévu.
  6. Les atteintes aux milieux naturels (forêts, haies, végétation) accentuent le problème, car l’eau des précipitations s’infiltre moins dans les sols.  Bien que les précipitations annuelles varient peu, leur distribution plus accentuée en automne et en hiver ne permet pas de remplir les nappes. 

Les mesures envisagées par l'Agence de l'eau

Face à cette situation, l’Agence de l’Eau Du bassin Artois Picardie a lancé une étude pour quantifier la ressource en eau et évaluer son évolution d’ici 2050. Evaluée à 500 millions de mètres cubes, cette quantité est attendue une diminution dans les 20 à 30 ans à venir.

 

Pour l’Agence il faut anticiper afin d’anticiper les conflits d’usage. Les préconisations pour le bassin d’Artois Picardie vont dans un sens de l’économie de la ressource et une régulation du partage.

 

Si quelques acteurs commencent à parler d’aménagements afin de faciliter l’infiltration de l’eau de pluie dans les sols, aucune réflexion de fond sur ce sujet ne semble émerger. 


Le déficit forestier du bassin picard et ses conséquences

Le climat en Picardie est influencé par le manque de couvert forestier, comme dans l'ouest du pays.
Peu de couvert forestier en Picardie, IGN

Pour la Terre du Futur, le climat de Picardie et la ressource en eau qui y est associée sont non seulement influencés par la position géographique de la région, mais également par le manque de végétation forestière qui la caractérise.

 

La photo ci-contre (crédit IGN) montre le manque de couverture végétale à l’ouest d’une ligne Bordeaux Ardennes dans laquelle se trouve le bassin d’Artois Picardie.

 

Cette configuration défavorise la recharge des bassins, dans des zones déjà peu arrosées en comparaison du reste du territoire (cf ci dessous).

La région artois picardie est peu arrosée.
Cumuls de précipitations annuelles

Cette effet semble encore peu présent dans l’esprit des responsables politiques ou d’organismes de gestion de la ressource en eau. 

 

Les études concernant  l’impact de la végétation sur la capacité des sols à absorber l’eau de pluie indiquent qu’un couvert forestier diminue d’un facteur 5 le ruissellement en comparaison d’une surface cultivée traditionnelle.

 

Les techniques d’agroforesterie,  quand elles sont déployées, diminuent aussi fortement le ruissellement.   

 

Ce sont des politiques d'occupation des sols faisant appel à une végétalisation accrue qui permettront de capter de plus grandes proportions des eaux de pluie. Pour cela il faut procéder à des reboisements significatifs et faire évoluer le modèle d'agriculture vers l'agro-foresterie.    


Climat et cycle de l'eau encore partiellement compris

La prise de conscience qui semble prendre forme sur les enjeux liés à la ressource en eau dans le contexte du changement climatiques sont bienvenus. Cependant le chemin à parcourir pour que la compréhension des solutions adéquates pour protéger le cycle de l'eau est encore long. Ce dernier est pourtant le garant de la disponibilité en eau pour nos besoins agricoles ou domestiques. 

 

Notre capacité à protéger ces ressources en eau déterminera le maintien de la capacité des systèmes agricoles à nous nourrir. C’est l’aménagement de nos sols, par la re–végétalisation forestière, ou encore l’agroforesterie qui nous permettra de maintenir le cycle de l’eau. Nous en avons besoin pour tout simplement maintenir la vie dans nos régions.  

 

C'est pourquoi la Terre du Futur propose des actions pour reboiser le territoire, notamment dans la partie ouest du pays. 

 

Sans évolution sur cet usage de nos sols, le climat en Picardie, comme en Beauce, pourrait évoluer vers la désertification.  


Cet article a été rédigé par Frédéric Durdux