Le carburant hydrogène, quel hallucinogène !

Le carburant hydrogène est hallucinogène.

Cette formule n’est pas de moi, elle vient de scientifiques et d'ingénieurs qui n’en reviennent pas de l’engouement que suscite l'idée de substitution des carburants dérivés du pétrole par un carburant hydrogène.

 

Les spécialistes de la question savent très bien que le carburant hydrogène est un leurre en tant que substitut aux carburants actuels. Mais cette formule « carburant hydrogène aux vertus hallucinogènes » mérite d’être rappelée, encore et encore et ce haut et fort.

 

Car depuis quelques jours se multiplient en France et en Europe les annonces des politiques et chefs d’entreprises qui déclarent vouloir y engloutir des milliards d’euros pour remplacer nos voitures, camions et avions à pétrole par les mêmes engins mus par un carburant hydrogène, équipé de toutes les vertus et présenté comme la solution aux maux du réchauffement climatique… Las ! Cette solution n’est qu’une chimère, nourrie par l’ignorance ou la mauvaise foi des impétrants. Et pour le comprendre il faut faire un peu de physique de base, en parlant de contenu énergétique.

Comparons pétrole et carburant hydrogène

Le pétrole d'abord...

Tout d’abord, il faut comprendre que le pétrole, gras, visqueux, malodorant, polluant, est d’un point de vue énergétique un liquide extraordinaire… Tout simplement parce que dans un tout petit volume, disons un litre pour simplifier, il contient une quantité importante d’énergie, à peu près 9kwh environ sous forme d’essence. Ça ne dira peut-être pas grand-chose à beaucoup d’entre nous, mais ce qu’il va être intéressant d’examiner, c’est la comparaison avec le carburant hydrogène.

 

Avant de faire cette comparaison, il faut aussi savoir que pour récupérer cette énergie de 9kwh, il ne faut pas en dépenser beaucoup : le quart ou la moitié en général suivant si on va chercher le pétrole en Arabie Saoudite ou dans des schistes bitumineux. Quoiqu’il en soit, d’un point de vue énergétique le bilan est exceptionnel puisqu’il est largement positif une fois l’essence dans notre réservoir.

Le carburant hydrogène ensuite...

Regardons coté carburant hydrogène maintenant. De l’hydrogène on en trouve un peu partout, dans l’air, dans l’eau, les roches, mais il faut arriver à le séparer du reste et l’isoler pour pouvoir l’utiliser. Pas très compliqué, les technologies sont connues depuis des décennies, et il en existe plusieurs.

 

Mais… Quelle est la quantité d’énergie contenue dans un litre de carburant hydrogène ? Monsieur, ça dépend ! Puisque c’est un gaz ! ça dépend de la pression ! Oui vous avez raison, allez, pour vous faire plaisir, je le comprime à 700 bars. (700 fois la pression atmosphérique), c’est pas mal non ? Olala oui ça va faire pas mal d’énergie dans un litre non ? C’est beaucoup 700 bars, allez me trouver un réservoir qui tienne cette pression… Il va falloir du costaud !

 

En bien… Flop flop flop … ce litre de carburant hydrogène gazeux à 700 bars ne contient que 1,43 kwh…. Soit 6 à 7 fois moins que l’essence… Il va falloir de gros réservoirs…. Mais ce n’est pas le plus gros inconvénient…

 

Le plus problématique c’est que ce litre de carburant hydrogène aura couté 1,7 fois plus d’énergie que ce qu’il contient… S’il est stocké sous forme gazeuse et près de deux fois plus s’il est stocké sous forme liquide à -253°C.  Et cette énergie nécessaire pour l’extraire et le stocker est en général dépensée sous forme électrique.

 

Donc le bilan énergétique du carburant hydrogène est tout simplement calamiteux en comparaison du pétrole, sans compter les difficultés de stockage : les molécules d’hydrogènes sont de petite taille et fuient même au travers de parois métalliques, et la version sous forme liquide est difficile à mettre en œuvre. 

Le carburant hydrogène est un mirage

Faire voler un petit avion démonstrateur à l’hydrogène pourquoi pas, mais il ne faut pas compter un transport de masse tel que nous le connaissons avec les avions à kérozène. Idem pour les voitures.

 

Voilà pourquoi le carburant hydrogène est un leurre… Hallucinogène, comme l’a été en son temps la prétendue recette des alchimistes pour transformer le plomb en or. D’un point de vue efficacité, pour mouvoir  avions, voitures, camions, rien ne vaut le pétrole. Mais le problème c’est qu’il pollue, tue la planète en la réchauffant et alimente une croissance matérielle inutile. Et puis les réserves sont limitées (heureusement, mais il y en a trop quand même). Le carburant hydrogène ne vaut pas mieux car l’humanité ne sait pas produire une électricité décarbonée. Les voitures électriques roulent beaucoup au charbon, bien pire que le pétrole d’un point de vue climatique.

Conclusion, la fausse route du carburant hydrogène

Tous ceux qui cherchent à engloutir des milliards d’euros pour faire des véhicules à carburant hydrogène gaspillent de l’argent et de l’énergie humaine qui serait bien mieux employés ailleurs, à commencer par des programmes de désintoxication des sociétés aux addictions modernes telle que l’hypermobilité. Ils créent des illusions pour les populations qui ne comprennent pas nécessairement ces questions énergétiques.

 

Investir des milliards dans le carburant hydrogène, que ce soit en France ou en Allemagne alors que le plan vélo en France n’est doté que de quelques millions et que le plan rail doté de rien du tout est particulièrement malsain.

 

Cela traduit un désarroi mortifère des élites et dirigeants face au défi qui consiste à changer les représentations qui doivent éclairer notre avenir. Le substitut au pétrole, c’est pas de pétrole du tout.

 

Et en ce qui concerne les déplacements c’est moins de déplacements, moins loin, moins souvent, moins vite, dans de plus petites voitures si c’est incontournable. Mais ça, le capitalisme refuse de le voir.

 

En tout cas le carburant hydrogène ne fait pas partie de l'énergie de demain.


L'article "le carburant hydrogène, quel hallucinogène" a été rédigé par Frédéric Durdux